Au sud du Triangle d'été, dans la constellation du Petit Renard, se trouve ma nébuleuse préférée : M27 dite nébuleuse Dumbbell, photographiée ici au 400 mm. Il s'agit d'un reste d'étoile qui a explosée en supernovæ il y a 10000 ans. Il s'agit d'une nébuleuse planétaire grande comme 1/5 de la pleine lune donc "assez" grande, pour une nébuleuse planétaire s'entend ! Elle reste pourtant invisible à l'œil nu car son éclat (sa magnitude) est de seulement 7,5. Je rappelle qu'en montagne, on peut distinguer des étoiles de magnitude de 6,5 au maximum. Elle se situe à 1360 années lumière de nous et se situe évidemment dans notre galaxie, la célèbre Voie Lactée.
Un peu de technique...
Comme l'immense majorité des objets du ciel, la nébuleuse planétaire M27 est petite et faible d'éclat. Il va donc falloir poser très longtemps. Ici, par exemple, j'ai posé 36 minutes alors que même en photo de ville de nuit, quelques secondes suffisent. Et pendant ce temps la terre tourne donc on ne peut la prendre en photo sans compenser la rotation de la terre sans quoi les étoiles n'auraient plus un bel aspect rond mais laisseraient des traînées... qui, quand c'est voulu, peuvent faire de jolies photos. Voilà pourquoi j'installe mon appareil photo Pentax 645Z et son téléobjectif de 400 mm sur cette monture un peu spéciale... dont je vais reparler plus tard.
L'astronomie à l'ère numérique offre un très grand privilège : il n'est plus besoin de poser trente six minutes d'affilée pour arriver à enregistrer la trace des étoiles et autres nébuleuses; vous pouvez dorénavant découper ce temps de pose global en une multitude de poses beaucoup plus courtes (ici 12 fois 3 minutes.) Ensuite, dans un logiciel astronomique ou Photoshop, il faut les "assembler" en les alignant et les superposer parfaitement ensemble. Cette série de poses plus courtes donc très sombres, une fois empilées, revient exactement au même en terme de temps d'exposition. Ainsi, au lieu de poser 36 minutes en continu - ce qui apporte son lot de complications et de risques de ratés, notamment à cause de ces foutus satellites Starlink qui laissent parfois des traits qui traversent la photo - j'ai posé 12 fois 3 minutes et, pour une fois, j'ai pu garder les 12 poses. Le travail de l'informatique a fait le reste !
Donc, pour éviter que les étoiles ne laissent une magnifique traînée dans le ciel due à la rotation de la terre cette-fois, j'ai monté mon appareil photo sur une grosse rotule un peu spéciale que l'on appelle une monture équatoriale (modèle AZ-EQ6 de SkyWatcher) et qui, grâce à un moteur qui tourne exactement à la vitesse de rotation de la terre, suit très précisément les étoiles afin de les garder les plus ponctuelles possible sur le capteur comme le montre l'agrandissement ci-dessous ou ci-dessus.
M27, Dumbbell
Détail à 100%
Cela dit, les astrophotographes savent que cela ne suffit pas et c'est pourquoi j'ai aligné à côté de mon appareil photo une petite lunette TS (60 mm de diamètre et 240 mm de focale) sur laquelle j'ai fixé un petit capteur CCD - une caméra numérique - reliée à un mini-ordinateur (Lacerta MGen II ci-contre) qui va mesurer très précisément les moindres variations de mouvements d'une étoile guide (une étoile témoin ou de référence) pour envoyer des micro-corrections vers la monture afin de rendre son suivi "presque" parfait. C'est redoutable ! Et cela offre un autre avantage pratique : ce petit ordinateur peut même commander mon appareil photo et réaliser automatiquement non seulement le suivi parfait des étoiles mais aussi le déclenchement de mon boîtier autant de fois que j'ai programmé, ici 12 x 3 minutes. Je peux donc observer le ciel avec mon autre télescope dédié à l'observation visuelle pendant ce temps.
Pour finir, on pourrait me demander pourquoi j'utilise mon téléobjectif de 400 mm plutôt qu'une lunette astronomique ? Eh bien il y a deux raisons à cela. Premièrement, j'aime l'idée de photographier le ciel depuis mon jardin avec le même matériel photo que lorsque je photographie les églises et cathédrales par exemple. Deuxièmement, comme les lunettes astronomiques n'ont pas de diaphragmes, les étoiles restent parfaitement rondes et n'ont pas, pour les plus brillantes d'entre elles, ces belles aigrettes que j'apprécie beaucoup. Je confesse tout de même que je n'aime pas quand il y en a trop (dix huit quand il y neuf lamelles) mais huit comme ici me va très bien. Je trouve cela esthétique.
Arnaud Frich, le 28 août 2023
Objectif PENTAX FA 645 400 mm F5,6 ED IF
f/9,5
400 iso
36 minutes (12 poses de 3 minutes chacune)
RAW (DNG) développés dans Adobe Camera Raw et assemblés dans Photoshop CC.
Appareil photo fixé sur une monture équatoriale SkyWatcher AZ-EQ6 motorisée et guidée automatiquement avec une caméra CCD Lacerta MGen II montée sur une petite lunette guide TS de 60mm et 240mm de focale.
Photo prise à partir de 00h42 TL, le 14 juillet 2020, à Cunlhat, dans le parc du Livradois-Forez en Auvergne, par un ciel bien transparent.
La nébuleuse Dumbbell, M27 dans la constellation du Petit Renard
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